Publié dans El Watan le 29 - 09 - 2012
La valorisation de l'enseignement
universitaire est une question sensible et fondamentale en Algérie pour
améliorer l'apprentissage et développer des compétences chez les
apprenants.
Presque tous les responsables des
établissements universitaires affirment que la valorisation de
l'enseignement est une nécessité absolue en Algérie pour améliorer la
formation universitaire et répondre aux besoins de la réalité
professionnelle et à ceux du marché. Hélas, de très nombreux
universitaires algériens attestent que l'enseignement n'est pas
valorisé, voire presque dévalorisé dans leur université, leur faculté,
leur département ou leur programme. De plus, ils confirment que ce sont
plutôt les activités de recherche scientifique qui reçoivent la plus
grande part de l'attention, de l'encouragement et de la valorisation, et
qui ont les conséquences les plus positives sur la carrière
professorale.
Il existe depuis longtemps un débat entre la place de
l'enseignement et celle de la recherche dans la carrière d'un enseignant
universitaire.
Ce qui m'intéresse est d'élaborer des réflexions sur
les conditions nécessaires pour que l'enseignement soit valorisé dans
les universités algériennes. En effet, les responsables universitaires
ont du mal à prendre en premier lieu une décision pour donner de la
visibilité à l'enseignement. Pourtant, la première condition pour le
valoriser est qu'ils lui accordent un appui absolu et incontestable, qui
doit donc outrepasser les paroles dans les discours vaillants sur son
intérêt à l'amélioration de l'enseignement universitaire en Algérie.
Pour
que l'enseignement soit valorisé, les autorités universitaires doivent
lui donner une visibilité étendue, faire des propositions et prendre des
actions concrètes qui motivent les enseignants, appuient les
enseignements et couronnent les réalisations et les travaux louables en
enseignement. C'est la condition sine qua non et elle exige un certain
courage. Hélas, la réalité quotidienne des enseignants universitaires
algériens est toute autre. En effet, ils font face à plusieurs défis
auxquels ils sont appelés à s'adapter, tels le renouvellement rapide des
connaissances, la problématique linguistique, l'intrusion des nouvelles
technologies dans l'enseignement, les caractéristiques des étudiants,
leur responsabilité administrative et de chercheur, leur contexte
socioprofessionnel et finalement leur responsabilité socioculturelle.
«Comment font-ils pour s'adapter à ces environnements ?», se demandait Ramdsen.
De
plus, on constate que dans la situation actuelle, plusieurs hauts
responsables hésitent à s'engager de façon claire et nette en faveur de
l'enseignement, notamment à la prise de conscience que les enseignants
algériens auront besoin d'une formation à la pédagogie universitaire
ciblée et d'environnements d'apprentissage propices à leur développement
intellectuel et professionnel. De plus, les enseignants auront besoin
de réseaux de partage de leur vécu de formateur et de leur expérience
professionnelle en milieu universitaire pour communiquer, collaborer à
propos de «l'acte d'enseigner». En effet, selon Elbe, «enseigner et
apprendre sont des activités interchangeables, on ne peut enseigner sans
apprendre et on ne peut apprendre sans enseigner».
Par ailleurs, les
propos des hauts responsables sont perçus comme si on avait des
soupçons que le soutien à l'enseignement est traduit comme un manquement
à la vocation de recherche de l'université. Lorsque les hautes
directions s'adressent aux enseignants universitaires, il est très rare
qu'elles invoquent les réalisations en enseignement et les
accompagnements qu'elles désirent mettre en place dans ce domaine. De
plus, elles citent rarement les réalisations des professeurs en
enseignement. En effet, l'analyse du discours des responsables
d'université et des hautes autorités montre que l'évocation du terme
enseignement est relativement rare. Faut-il en déduire que
l'enseignement n'a pas d'importance aux yeux de nos responsables ?
Il
est certain que pour encourager les enseignants universitaires à
s'engager entièrement en enseignement, les autorités doivent assumer une
responsabilité pédagogique fondamentale : soutenir clairement les
activités d'enseignement, reconnaître au grand jour leurs réalisations
et travaux et les féliciter en célébrant avec eux les succès obtenus ou
les défis surmontés. En effet, la plupart des enseignants sont motivés
afin de procurer un apprentissage de qualité à leurs étudiants, mais ils
n'utilisent pas les bons moyens pour y parvenir. Par moyens, on fait
allusion surtout aux soutiens didactiques et aux conseils pédagogiques
pertinents en vue d'améliorer leur enseignement. En effet, le premier
constat est l'absence de formation à la pédagogie aux enseignants pour
améliorer leur processus d'enseignement au regard de l'évolution rapide
des connaissances dans le domaine de l'éducation.
De plus, lorsqu'un
universitaire commence à enseigner, il est en général étudiant au
doctorat ou il vient de finir une thèse ou un post-doctorat sur un sujet
extrêmement pointu. Une fois qu'il obtient un poste d'enseignant, il
s'agit alors de prendre en charge un ou plusieurs enseignements qui
sortent de sa spécialité stricte. À vrai dire, il est même plutôt rare
d'enseigner exactement dans son sujet de thèse. Et c'est là que la
problématique de l'acte d'enseigner se pose sérieusement.
Il arrive
également que pour satisfaire aux besoins de la formation à la
pédagogie, les responsables universitaires s'investissent dans des
séminaires. On tient à attirer leur attention que les séminaires
organisés par les autorités universitaires font rarement partie d'un
programme d'apprentissage à la pédagogie cohérent, c'est-à-dire qui
réponde aux exigences d'une planification méthodique de l'enseignement,
de l'apprentissage et surtout qui «contextualise» adéquatement
l'enseignement en tenant compte des particularités de la formation des
professionnels du milieu universitaire. De plus, les connaissances
pédagogiques ainsi acquises par les enseignants et les intervenants
académiques lors se traduisent difficilement sur le terrain par la
transformation des attitudes et des approches pédagogiques.
Enfin,
l'apprentissage à la pratique de l'acte d'enseigner, selon les normes en
pédagogie universitaire, représente le premier chaînon dont un
enseignant universitaire a besoin pour développer les compétences
enseignantes et procurer des pratiques pédagogiques centrées sur les
étudiants et l'apprentissage. En effet, «personne ne commence par bien
enseigner. Enseigner à l'université ça s'apprend» (Herbert Kohl).