Cette date limite témoigne également de la course
derrière la documentation que doivent se procurer les candidats pour
compléter leur dossier académique. En regard des délais courts pour la
constitution et le dépôt des dossiers des candidats, le premier constat
est la non-disponibilité immédiate des informations complémentaires sur
les modalités d'organisation et du déroulement de ce concours.
En
d’autres termes, ces informations ne sont pas à portée de main.
L’information circule beaucoup plus dans les réseaux sociaux tels que
Facebook que dans les réseaux officiels. En effet, les groupes Facebook
sont nombreux à collaborer et à communiquer sur la préparation du
concours de maîtrise en sciences de la santé. De ces groupes, on a
analysé les véritables besoins des futurs candidats et leurs
problématiques pour la constitution de leur dossier académique, et
surtout la rédaction des rapports d’activités hospitalières et des
activités pédagogiques tout en se posant la question sur leur utilité et
leur pertinence académique. Espérant également que les futurs membres
des jurys en sciences de la santé seront à l’écoute de nos réflexions,
suggestions et propositions. On tient d’emblée à signaler que le dossier
administratif ne mentionne pas et n’exige pas un curriculum vitae (CV)
ni une lettre de motivation du candidat.
Par contre, il mentionne
textuellement de fournir une lettre de demande manuscrite de
participation au concours. Cette dernière est une procédure purement
administrative et ne peut couvrir à elle seule la nécessité de connaître
le candidat avant de l’apprécier lors de l’étude préliminaire des
dossiers et lors de l’entrevue avec les membres du jury. En d’autres
termes, la lettre de motivation reflète la personnalité du candidat, ses
ambitions, son intérêt pour le concours, ses habilités pour
l’enseignement en sciences de la santé et son approche des soins de
santé.
Le curriculum vitae est le reflet de ses capacités de
rédaction et d’organisation sur le plan cognitif. De plus, les membres
de jury accordent moins de deux minutes pour lire chaque document. Ces
deux documents doivent être succincts, clairs et ne contenant que
l’essentiel sur une seule page et au maximum sur deux pages. En plus du
dossier administratif, il est demandé au futur candidat de rédiger un
rapport des activités hospitalières et des activités pédagogiques. A la
lecture de l’arrêté interministériel n° 34 du 19 novembre 2009 fixant
les modalités d'organisation et de déroulement des concours d'accès aux
grades de maître assistant hospitalo-universitaire, la section 1 de
l’article 37 paragraphe 1 définit les futures tâches des candidats au
concours. On note surtout la prédominance des activités pédagogiques. En
des termes pédagogiques, il est question des prestations
d’enseignements, de planification de cours, d’élaboration des contenus
disciplinaires et de supports pédagogiques, et d’assurer des
enseignements au lit du malade. Il devrait y avoir une corrélation et
une cohérence entre les futures tâches des candidats, décrites dans
l’arrêté interministériel, et la teneur ou le contenu des rapports
d’activités pédagogiques. C’est également sur ces tâches pédagogiques
que le jury doit analyser et porter une attention particulière lors de
l’analyse du dossier académique et lors l’entrevue avec le candidat. Ce
dernier doit être évalué sur ses habilités à communiquer, à enseigner et
à mener des activités d’apprentissage en sciences de la santé. En
effet, le volet pédagogique représente l’essence même de l’activité
médicale en milieu hospitalo-universitaire, et pourtant, les futurs
candidats au concours n’ont pas eu accès ni à des apprentissages à la
pédagogie médicale ni à des formations à la pratique de l’enseignement.
Le
rapport des activités hospitalières est centré sur la pratique clinique
en sciences de la santé. Ce rapport reflète les activités menées en
soins de santé, l’expertise disciplinaire et les compétences médicales
du candidat. Par ailleurs, les modèles de rédaction de ces rapports
d’activités ne sont plus d’actualité, et les candidats se sentent perdus
en l’absence de leur mise à jour effective, et même les anciens modèles
de rédaction ne sont pas à la portée des candidats. Chaque futur maître
assistant en sciences de la santé se trouve à élaborer son dossier
académique et rapport d’activités en catimini, et selon ses propres
conceptions et perceptions.
La mise en place d’un service de soutien
et de conseil tant technique que pédagogique est plus que nécessaire au
niveau de chaque faculté de médecine, et ce n’est pas pour leur fournir
des informations factuelles, mais pour leur procurer des conseils aux
méthodes d’élaboration, de rédaction de leurs dossiers et de les
préparer aux entrevues. Ces dernières sont également du ressort des
responsables hiérarchiques hospitalo-universitaires soucieux de la
progression méritoire des futurs candidats. Enseigner en sciences de la
santé n’est pas aussi simple que l’on prétend, car l'enseignement en
médecine est une activité beaucoup plus complexe.
Les futurs
candidats au concours sont les seuls à ne pas avoir acquis durant leurs
cursus d’études médicales une formation pédagogique sur la pratique de
l’enseignement pour exercer leur métier de futur enseignant
hospitalo-universitaire. Ceci explique en partie la qualité des
prestations des enseignements lors de l’épreuve pédagogique, voire son
impact sur la qualité de la formation médicale en général, et même la
qualité des soins en particulier. Une fois leurs postes
hospitalo-universitaires acquis, ils seront confrontés, comme leurs
supérieurs hiérarchiques, à diverses difficultés et problèmes
pédagogiques, tels que l'évaluation des apprentissages, la planification
de contenus disciplinaires, les méthodes d'enseignements cliniques, la
conception de programme disciplinaire et de formation médicale, et bien
d’autres aspects de la pédagogie médicale.
D’autre part, la plupart
des candidats assurent des prestations d’enseignement selon un modèle
traditionnel basé sur la transmission quantitative des connaissances.
L’acte d’enseigner et le processus d’enseignement sont souvent peu
planifiés, voire improvisés, et font souvent appel au bon sens et à
l’intuition, mais la plupart des futurs hospitalo-universitaires sont
motivés à se procurer des pratiques enseignantes et des apprentissages
de qualité. Hélas, ils ne disposent pas de suffisamment de ressources
pédagogiques et ils n’utilisent pas les bonnes méthodes d’enseignement
et les bonnes stratégies d’apprentissage pour y parvenir. C’est sur ces
deux derniers aspects pédagogiques très importants que le jury doit
focaliser toute son attention lors de la prestation d’enseignement des
candidats, et selon une grille d’évaluation fiable et valide.
Par
ailleurs, le futur candidat doit assurer une prestation d’enseignement
devant le jury et un groupe d’étudiants. Par manque de connaissances à
la pratique de l’enseignement en sciences de la santé, cette prestation
est centrée beaucoup plus sur l’expertise disciplinaire que sur le
processus d’enseignement. Ce dernier représente l’essence même de cette
prestation et de l’activité pédagogique en général. L’idéal serait de
donner la chance au futur candidat de s’exprimer sur son processus
d’enseignement et sur ses habiletés de communication. En d’autres
termes, il faut donner la chance au candidat de s’exprimer sur les
activités pédagogiques et les stratégies d’enseignement à promouvoir
pour assurer une prestation d’enseignement de qualité et qui répond aux
normes des sciences de l’éducation.
Le candidat doit être guidé et
orienté par les questions du jury. Il faut noter également que le jury
doit avoir acquis des connaissances en pédagogie médicale pour pouvoir
mener à terme, dans de bonnes conditions et dans la bonne direction une
entrevue avec un candidat en ce qui concerne le volet pédagogique et la
prestation d’enseignement. Il est également très important que le jury
indique au candidat d’une manière claire et explicite que c’est la
qualité du processus d’enseignement qui sera évaluée et non pas la
quantité des connaissances. L’expertise disciplinaire ou les
connaissances médicales sont évaluées sur l’épreuve rédactionnelle et
orale.
Beaucoup de candidats mémorisent un contenu disciplinaire
donné puis le répètent ou le transcrivent intégralement. Cette
prestation est une course contre la montre pour déballer le maximum
d'informations sur une pathologie choisie. L’idéal serait que cette
épreuve soit centrée sur la résolution de problèmes cliniques ou l’étude
de cas, durant lesquels le jury appréciera et notera le candidat sur la
compétence fondamentale en sciences de la santé : le raisonnement
clinique. Finalement, les processus d’enseignement et de raisonnement
clinique sont couramment négligés, souvent passés sous silence et
fréquemment scotomisés par les membres du jury. Le rapport des activités
pédagogiques doit être signé par le président du comité pédagogique
témoignant de la qualité ou de la véracité des documents. Si l’expertise
disciplinaire d’un responsable hiérarchique hospitalo-universitaire
n’est pas contestable, celle de l’expertise pédagogique est à prendre en
considération lors de l’appréciation et de l’évaluation du volet
pédagogique du dossier du candidat.
De plus, on s’interroge sur
l’existence d’une grille pédagogique valide et fiable pour l’approbation
et l’évaluation du volet activité pédagogique. On a signalé auparavant
que ces responsables eux-mêmes ne sont pas formés à la pédagogie
médicale et donc à l’évaluation qualitative du volet pédagogique. Ce
dernier autant que le volet de l’activité hospitalière sont évalués
d’une manière quantitative par le cumul de points attribués pour chaque
item.
La consultation d’anciens rapports des activités hospitalières
et pédagogiques montre que le contenu est un étalement livresque de
toutes les activités de formation depuis le début du cursus
universitaire en sciences de la santé au dernier jour de la rédaction de
ces rapports. Cet étalement du cursus universitaire fournit peu
d’informations et d’indices sur la qualité des apprentissages et sur
celle de la qualité des activités hospitalières d’autant que les
responsables hiérarchiques hospitalo-universitaires sont très au courant
des faits, des réalités et de la qualité de la formation médicale en
général, et qu’une réforme des curriculums des formations en sciences de
la santé s’avère plus que nécessaire.
Par ailleurs, il existe une
confusion entre le terme activité pédagogique et formation pédagogique,
et il est fondamental de les distinguer. Une formation pédagogique est
une activité d’apprentissage des concepts des sciences de l’éducation
appliquées en sciences de la santé telle que la notion d’apprentissage
en sciences de la santé, la planification pédagogique d’un plan de
cours, la conception de programme disciplinaire, l’évaluation des
apprentissages, la planification de séance d’enseignement magistral,
l’utilisation des stratégies pédagogiques, les approches des
enseignements en milieu de santé, les courants pédagogiques en éducation
et la motivation des étudiants en contexte des sciences de la santé.
Il
existe également une confusion sur le terme activité pédagogique et
activité de formation médicale continue, car les candidats ont tendance à
tout inscrire dans le volet des activités pédagogiques. Selon le
dictionnaire de l’éducation Legendre, une activité pédagogique est
l’ensemble des activités d’enseignements en lien avec l’acte
d’enseigner, d’apprentissage, de création de support didactique, de
travail pratique, travail dirigé et de mémoire de thèse accompli ou
suivi par un candidat. La disponibilité d’un modèle de rapport des
activités hospitalières et pédagogiques s’avère plus que nécessaire pour
orienter les futurs candidats. Une réforme majeure des textes et de
l’arrêté interministériel régissant ce concours est plus que nécessaire
pour s’adapter à l’évolution de la réalité professionnelle, à l’approche
pédagogique des enseignements en sciences de la santé et de la
formation médicale en général. Le législateur doit être soutenu et
conseillé par des experts en pédagogie médicale afin de donner du sens
et de la signification aux textes législatifs et aux différents rapports
d’activités.
Finalement, il est essentiel que le ministère de
l’Enseignement supérieur (MESRS) révise également les normes de
sélection des dossiers des candidats tout en intégrant la certification
ou la formation à la pédagogie médicale comme critère d’admission au
concours.