La formation médicale
continue (FMC) est sans aucun doute l’investissement le plus sûr qui permettra,
d’une part, d’améliorer la qualité des services de soins offerts à la société,
et d’autre part, de rehausser le niveau des pratiques et des compétences dans
tous les domaines disciplinaires ou de spécialisations des services de santé.
En d’autres termes, les institutions de formation étatiques et privées doivent
impérativement prêter une attention particulière aux impacts et retombées
positives de la formation médicale continue sur les pratiques des professionnels
de la santé et sur la qualité des services de soins offerts à la population en
particulier et de la société en général.
Par ailleurs, la formation médicale continue
est depuis quelques années au centre d’un grand débat dans les milieux de santé.
Il est reconnu qu’aucun professionnel de la santé ne peut prétendre exercer son
métier avec les seuls acquis de sa formation médicale ou universitaire initiale.
Ceci est vrai pour toutes les activités de soins et surtout dans la profession
médicale. L’exercice professionnel amène tout praticien à constater de possibles
besoins de formation complémentaire en particulier au regard de l’évolution
rapide des soins de santé, des savoirs en sciences de la santé et du développement
de nouvelles techniques. La nécessité de faire des apprentissages
complémentaires ne fait que débuter et être présente durant toute la carrière
d’un professionnel de la santé, car ce siècle est caractérisé par un renouvellement
rapide des connaissances et il est difficile pour un professionnel de la santé
de demeurer au fait des dernières données scientifiques disponibles. Pour se
conformer à ces dernières, mettre à jour ses connaissances et de maintenir de bonnes
habiletés professionnelles, il est fondamental d’organiser des formations
continues.
D’autre
part, il existe un écart entre le monde de la recherche médicale, celui de
l’exercice professionnel et les soins de santé offerts à la population. Afin de
permettre l’implémentation des nouvelles découvertes scientifiques et des
avancés en soins de santé, des heures de formation continue ont été
préconisées. De plus, il existe également un écart entre la pratique professionnelle
quotidienne et la pratique médicale idéale basée sur des données probantes.
L’obligation morale de fournir des services de soins de qualité à la population,
quel que soit le domaine de spécialisation, ne nécessite pas simplement une
mise à jour des connaissances, mais surtout leur transfert dans la pratique
professionnelle courante. À cet effet, la formation médicale continue est le
lieu idéal pour la mise à jour des connaissances et des compétences pour
favoriser le transfert des apprentissages et finalement de se tenir au fait des
pratiques et techniques de soin les plus récentes.
En
général, une formation médicale continue répond principalement à des objectifs
de perfectionnement et de développement des habiletés professionnelles requises
pour assumer une ou plusieurs fonctions de soins. Selon la durée de chaque
formation et de son volume horaire, la finalité de chaque session de formation
est un certificat ou une attestation de formation alors que le diplôme est
réservé à la formation initiale des sciences de la santé. Sans prétendre avancer qu’il existe en Algérie une
grande culture de formation médicale continue, cette dernière est en plein
essor grâce aux multiples offres de formations des différents organismes et
institutions notamment privés dans tous les champs disciplinaires en sciences
de la santé. La gestion tant académique que pédagogique de cet important
bassin de fournisseurs de formations continues et des offres de formation pose
de nombreux problèmes de reconnaissance institutionnelle et notamment de leur
aboutissement et finalité sociale.
En d’autres termes, la profusion des offres de
formations continues donne matière à réflexion quant à la crédibilité de leur
finalité pédagogique et sociale : certificat ou attestation de formation. De
plus, il y a également matière à réflexion quant à la qualité de conception de
leurs curriculums de formation, de leurs programmes disciplinaires et de la
qualité des apprentissages. Il en est de même de l’absence d’évaluation de ces
formations par un organisme compétent, autonome et doté d’expertise pédagogique
reconnue. De plus, il est également important de prendre en considération la
qualité des apprentissages en absence des normes de pratiques pédagogiques en
vigueur surtout de pratique d’enseignement. En d’autres termes, il y a un vaste
champ de réflexion pour discerner et décortiquer tous ces aspects suscités, et
surtout pédagogiques de toutes les offres de formations continues en Algérie.
Dans cette contribution, on compte traiter de la finalité
pédagogique de la formation médicale continue que ce soit du domaine public ou
privé en sciences de la santé. Il est d’emblée important de signaler qu’aucun programme
en contexte de la formation continue n’est reconnu directement par le ministère
de l’Enseignement supérieur (MESRS). Les offres de formation qui prétendent
l’être ne le sont que seulement à l’intérieur de leur institution d’une manière
tacite ou implicite en l’absence de toute évaluation de la formation par le MESRS
ou par un organisme autonome et compétent dans le domaine de la conception des programmes
et des curriculums de formation.
Selon
l’Association française de Normalisation (AFNOR), une attestation de formation
est un document écrit et délivré par l’organisme formateur reconnaissant au
titulaire un niveau de capacité vérifié par un contrôle ou une évaluation des
apprentissages. Dans notre contexte professionnel et socioculturel, une
attestation de formation atteste le plus souvent de la participation à une
action de formation sans évaluation des apprentissages. À cet effet, une
attestation de formation ne prouve pas la qualité et la profondeur des
apprentissages. Ces formations sont le plus souvent à titre informationnelles,
unidirectionnelles sur le plan des enseignements et l’impact sur le transfert
des apprentissages est souvent limité d’autant que les activités
d’apprentissages sont souvent absentes et les délais d’assimilation ou de
construction des connaissances sont trop courts. En général, une attestation de
formation médicale continue s’étale sur une à deux journées et totalise en
moyenne 16 heures de formation en présentiel.
De plus, les
attestations de formation font rarement partie d'un programme d'apprentissage
qui soit cohérent, c'est-à-dire, qui réponde aux exigences d'une planification méthodique
et pédagogique des enseignements, des apprentissages et surtout, qui «
contextualise » adéquatement les formations en tenant compte des particularités
de la formation de chaque domaine professionnel des soins. De plus, les
connaissances acquises par les professionnels de la santé lors de ces
formations courtes se traduisent difficilement sur le terrain par la
transformation des attitudes, des habiletés et des pratiques en milieu de
travail.
Un certificat en contexte de
la formation continue comptabilise 140 heures d’apprentissages étalés sur une
période suffisante pour s’assurer de la qualité et de la profondeur des apprentissages,
et du transfert des acquis. De plus, un certificat de formation est
parachevé par des évaluations continues des apprentissages selon les normes
docimologiques en vigueur, et suivi de rétroaction formative. En d’autres
termes, un certificat de formation certifie que l’apprentissage est de qualité
et doté d’un programme selon une approche par compétence, des buts de formation
claire, des objectifs d’apprentissage précis,
de
critères d’évaluation cohérents, d’une note finale ainsi qu’une conclusion sur
les apprentissages pour chaque apprenant. Finalement, un certificat peut
faire partie d’un curriculum ou programme de formation à l’exemple des
universités de l’Amérique du Nord.
Par
ailleurs, l’absence d’un organisme autonome et compétent en évaluation des
programmes formations en Algérie, les fournisseurs de formations sont
confrontés à la reconnaissance académique et pédagogique de leur programme
disciplinaire. De plus, il existe un vide juridique pour la reconnaissance de ces
formations au ministère de l’Enseignement supérieur, et voire l’absence de ressources
humaines compétentes pour l’évaluation des programmes disciplinaires en
contexte de la formation médicale continue.
Certains organismes de formation Algériens se sont orientés vers des
institutions européennes et canadiennes pour faire reconnaitre et faire valoir leur
programme de formation selon les normes pédagogiques en vigueur. Malgré leur
validation par des institutions fiables et crédibles, leur reconnaissance par
le ministère de l’Enseignement supérieur reste encore hypothétique.
Selon la société de formation
et d’éducation continues au Canada (SOFEDUC), une formation continue est
reconnue et validée compte tenu du respect de dix critères de qualité
pédagogique et administrative. La
SOFEDUC est l'organisme autonome et officiel au Canada qui accrédite les
organisations et les institutions de formation pour l'émission des unités
d'éducation continue (UEC). En d’autres termes, il est exigé des organismes
fournisseurs de formation étatique ou privé de respecter les dix normes de
qualité afin d’être autorisé à émettre des UEC. Cet organisme autonome définit
l’unité d’éducation continue comme dix heures de participation à une activité
structurée de formation, organisée et dirigée par une organisation accréditée,
animée par des formateurs compétents et sanctionnés par une évaluation des
apprentissages. À ce jour, seulement
deux organismes algériens privés ont obtenu leur accréditation selon les normes
et critères de qualités exigés par la SOFEDUC au Canada.
Il est important à ce que le MESRS comble le vide
juridique pour reconnaitre les certifications en contexte de la formation
continue et de promouvoir un organisme privé ou étatique pour la reconnaissance
académique et pédagogique des programmes disciplinaires de niveau universitaire,
car promouvoir la culture de la formation continue est à la base du
développement des compétences dans toutes les activités et domaines
scientifiques et professionnels. Il est également important pour le MESRS
d’encourager les organismes privés fournisseurs des services de formation
continue de qualité selon les normes pédagogiques en vigueur.
Finalement, on ne
rappellera jamais assez que le bricolage et l’amateurisme dans la gestion pédagogique
des formations continue doivent cesser pour donner la chance aux ressources
humaines compétentes de faire valoir leur savoir-faire et savoir agir dans le
domaine de la gestion de formation. La notion de certification en contexte de la formation
continue doit être soutenue et promue comme outil de progression de carrière et
de développement des compétences professionnelles au service de la société.