Le Quotidien d’Oran - 25.11.2021
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La
Formation continue (FC) est sans aucun doute l'investissement le plus sûr qui
permettra d'améliorer la qualité des offres de service à la société et de
rehausser le niveau des pratiques et des compétences dans tous les domaines
disciplinaires et professionnels. Pour
ce faire, les organisations de formation doivent impérativement prêter une
attention particulière aux impacts et retombées positives de la FC sur les
pratiques des professionnels et la qualité des services offerts à la population
en particulier et de la société en général d'autant que les enjeux de la
compétitivité et de rentabilité socio-économique font appel à l'innovation
pédagogique et technologique dans la gestion des processus qualité des FC.
De
plus et quels que soient les domaines des pratiques professionnelles, la FC est
au centre d'un grand débat dans les milieux universitaires, de la santé et de
la formation professionnelle, car il est reconnu qu'aucun praticien ne peut
prétendre exercer son métier avec les seuls acquis de sa formation initiale.
Ceci est vrai pour tous les métiers et surtout dans le domaine médical et
universitaire. L'exercice pratique d'un métier amène tout professionnel à
constater de possibles besoins d'apprentissage complémentaire en particulier au
regard de l'évolution rapide des savoirs et du développement de nouvelles
techniques et compétences disciplinaires. En d'autres termes, la nécessité de
compléter des apprentissages supplémentaires ne fait que débuter et être
présents durant toute la carrière d'un professionnel, car ce siècle est
caractérisé par un renouvellement rapide des connaissances, et il est difficile
pour un professionnel de demeurer au fait des dernières données scientifiques
disponibles. À cet effet, la FC est le lieu idéal pour la mise à jour des
connaissances et des compétences pour favoriser le transfert des apprentissages
et finalement de se tenir au fait des pratiques et techniques les plus récentes.
Par
ailleurs, l'enseignement en contexte de la FC est à la base de l'amélioration
des compétences professionnelles et des expertises disciplinaires centrées sur
les apprenants et les apprentissages, d'autant qu'il existe une relation
significative entre la qualité de l'enseignement dispensé et l'apprentissage en
profondeur réalisé. Pour ce faire, chaque organisation de formation publique ou
privée devrait être soumise socialement à une obligation de satisfaire les
besoins pédagogiques et disciplinaires de ses apprenants et de fournir à la
société des professionnels autonomes et compétents en mesure d'assurer, partout
en Algérie, des offres de service de qualité. De plus, il est important de
signaler que la qualité des apprentissages est la mission première de toute
organisation de FC, et cela devrait être plus que jamais au cœur des
préoccupations des responsables sur les plans disciplinaires, administratifs et
surtout pédagogiques.
En
général, la FC répond principalement à des objectifs de perfectionnement et de
développement des compétences et des habiletés professionnelles requises pour
assumer une ou plusieurs fonctions ou tâches. À cet effet et avant que tout
professionnel s'engage en FC, il est de son droit élémentaire d'exiger de
l'organisation de formation son accréditation par un organisme autonome et
compétent pédagogiquement parlant, et non pas sur une simple présentation d'une
autorisation administrative d'exercice comme centre formateur.
Il
est également du droit élémentaire de tout apprenant en contexte de la FC de
consulter les critères pédagogiques reflétant la qualité des apprentissages,
des enseignements, ainsi que les compétences tant pédagogiques que
disciplinaires du formateur. Il ne suffit pas au formateur d'être expert dans
un domaine donné, mais également d'être doté d'expertise pédagogique pour
assurer des apprentissages et des enseignements de qualité selon les normes en
vigueur d'autant que les pratiques et les compétences pédagogiques ont un
impact considérable sur les apprentissages.
Sans
prétendre avancer qu'il existe en Algérie une grande culture de FC, cette
dernière est en plein essor grâce aux multiples offres de service de FC des
différentes organisations et notamment privées dans tous les champs
disciplinaires. La gestion tant académique que pédagogique de cet important
bassin de fournisseurs de FC pose de nombreux problèmes de reconnaissance
institutionnelle et surtout pédagogique de leur programme de formation. En
d'autres termes, la profusion des offres de FC donne matière à réflexion quant
à la crédibilité de leur finalité pédagogique, disciplinaire et sociale. De
plus, il y a également matière à réflexion quant à la qualité de conception de
leurs curriculums de formation, de leurs programmes disciplinaires, la qualité
des apprentissages et des enseignements et finalement de l'expertise
pédagogique des formateurs. Il en est de même de l'absence d'évaluation de ces
formations par un organisme autonome, compétent et doté d'expertise pédagogique
reconnue en Algérie. De plus, il est important de signaler qu'aucun programme
en contexte de la FC n'est reconnu, pédagogiquement parlant, ni par le
ministère de l'Enseignement supérieur ni par le ministère de la Santé. À cet
effet, il y a un vaste champ de réflexion pour discerner et décortiquer tous
ces aspects suscités, et surtout pédagogiques de toutes les offres de FC dans
notre pays.
De
plus et pour la finalité de chaque session de FC, une attestation est délivrée
par l'organisation de formation reconnaissant au titulaire un niveau de
capacité ou de compétence, mais sans évaluation des apprentissages. Dans notre
contexte professionnel et socioculturel en Algérie, une attestation de
formation atteste la présence et la participation passive à une action de
formation sans évaluation des apprentissages. En d'autres termes, une
attestation de formation ne prouve en rien la qualité et la profondeur des
apprentissages. Ces FC sont le plus souvent à titre informationnel,
unidirectionnel et à sens unique sur le plan des enseignements. L'impact sur le
transfert des apprentissages est souvent limité d'autant que les activités
d'apprentissage sont souvent absentes. En général, une attestation de FC
s'étale sur une à deux à trois journées et totalise en moyenne 6 - 18 heures de
formation en présentiel.
Les
attestations de FC font rarement partie d'un programme d'apprentissage qui soit
cohérent, c'est-à-dire, qui réponde aux exigences d'une planification
méthodique et pédagogique des enseignements, des apprentissages et surtout, qui
« contextualise » adéquatement les FC en tenant compte des particularités des
apprentissages de chaque discipline et domaine professionnel. À cet effet, les
connaissances acquises par les professionnels lors de ces formations courtes se
traduisent difficilement sur le terrain par la transformation des attitudes,
des habiletés techniques et des pratiques professionnelles.
Par
ailleurs, un certificat en contexte de la FC comptabilise en moyenne plus de
140 heures d'apprentissage étalé sur une période suffisante pour s'assurer de
la qualité et de la profondeur des apprentissages, et du transfert des acquis
ou des connaissances dans la réalité pratique ou professionnelle. De plus, un
certificat de formation est parachevé par des évaluations formatives des apprentissages
avec rétroaction selon les normes en vigueur. En d'autres termes, un certificat
de formation certifie que l'apprentissage est de qualité et doté d'un programme
selon une approche par compétence, des buts de formation claire, des objectifs
d'apprentissage précis, des critères d'évaluation cohérents, d'une note finale
ainsi qu'une lettre de suivi des apprentissages pour chaque apprenant.
Finalement, un certificat peut faire partie d'un curriculum ou programme de
formation à l'exemple des universités de l'Amérique du Nord.
En
l'absence d'un organisme autonome et compétent pour l'évaluation pédagogique
des programmes de FC en Algérie, les organisations et fournisseurs de
formations sont confrontés à la reconnaissance académique et pédagogique de leur
programme de formation. De plus, il existe un vide juridique pour la
reconnaissance de ces formations au ministère de la Santé et au MESRS, et voire
même l'absence ou l'indisponibilité des ressources humaines compétentes pour
l'évaluation pédagogique des programmes en contexte de la FC. Pour ce faire,
certains organismes de formation algériens se sont orientés vers des
institutions européennes et canadiennes pour faire reconnaître et faire valoir
leur programme de formation selon les normes pédagogiques en vigueur.
Selon
l'AQFC (Assurance qualité formation continue), chaque programme de FC est
reconnu, accrédité et validé compte tenu du respect de sept critères de qualité
pédagogique et administrative. Il est exigé des organismes fournisseurs de FC
de respecter les normes qualité afin d'être autorisé à émettre des crédits de
formation continue (CFC). Cet organisme autonome définit CFC comme dix heures
de participation à une activité de formation structurée, organisée et dirigée
par une organisation accréditée, animée par des formateurs compétents et
sanctionnés par une évaluation des apprentissages.
Il
est important à ce que le MESRS et le ministère de la Santé comblent le vide
juridique pour reconnaître et promouvoir un organisme autonome ou privé pour la
reconnaissance académique et pédagogique des programmes disciplinaires, car
promouvoir la culture de la FC est à la base du développement des compétences
dans tous les activités et domaines scientifiques et professionnels. Il est
également important pour le MESRS et le ministère de la Santé d'encourager les
organismes privés fournisseurs des services de FC de se conformer aux normes et
aux critères pédagogiques en vigueur selon AQFC. En d'autres termes, les
processus qualité représentent le facteur essentiel à l'émergence d'une culture
de FC en Algérie, mais aussi de l'émergence d'une société plus dynamique et
prospère sur le plan socio-économique.
Ainsi,
les stratégies pour valoriser et promouvoir la démarche d'assurance qualité en
contexte de la formation continue sont nombreuses, et nous espérons que les
pouvoirs publics, les ministères de l'Enseignement supérieur (MESRS) et de la
Santé manifestent un écho favorable et qu'ils soient sensibles aux enjeux des
mutations de la FC dans notre pays.
Finalement,
on ne rappellera jamais assez que l'amateurisme dans la gestion pédagogique des
FC doit cesser pour donner la chance aux ressources humaines compétentes de
faire valoir leur savoir-faire et savoir agir dans le domaine de la gestion de
FC. La notion de certification des organisations de formation à l'assurance
qualité doit être soutenue et promue comme outil de gestion des formations tant
sur le plan pédagogique que sur le plan administratif.
*
Conseiller et concepteur pédagogiques -
**
Consultant en gestion de formation