Le Quotidien d’Oran - 02.08.2021
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Les concours hospitalo-universitaires (HU)
ont pour but l’intégration et la mobilisation des futurs professionnels de la
santé pour satisfaire les besoins des facultés de médecine dans les domaines de
la pédagogie à des fins d’enseignement, de la recherche médicale et
d’encadrement des thèses et finalement dans la gestion de la qualité des soins
de santé en milieu hospitalier. Ces concours sont une étape capitale et
considérée comme étant la voie d’accès à la carrière HU pour un médecin
spécialiste de santé publique et comme une progression de carrière pour les
maitres de conférences A et B, pour le grade de professeur et finalement pour
le grade de chefferie de service où une décision fondamentale devrait être
prise par les membres du jury pour promouvoir tout un projet de carrière HU d’un
professionnel de la santé.
Par les barèmes de notation des trois épreuves des concours HU, les membres du
jury évaluent les compétences et les habiletés professionnelles attendues des candidats
à des fins d’une carrière hospitalo-universitaire. Hélas, depuis leur
promulgation, ces épreuves et barèmes n’ont pas connu de modification ni d’amélioration
ou des adaptations au regard de l’évolution des pratiques pédagogiques et
docimologiques en contexte des sciences de la santé malgré que les normes fondamentales
pour promouvoir la qualité des enseignements sont principalement la double
expertise pédagogique et disciplinaire ou médicale des médecins HU dont les
finalités sont la promotion respectivement
de la qualité de la formation
médicale et l’amélioration des soins de santé de haut niveau.
Le but de cette contribution est de soutenir la réactualisation pédagogique
et docimologique des trois épreuves des concours HU pour espérer une mutation en faveur de
l’amélioration de la formation médicale.
Par ailleurs, l’objectif de cette contribution est de procurer des
argumentaires en faveur de la réévaluation de ces épreuves des concours HU : Épreuve pédagogique, épreuve d’anglais et l’épreuve pratique. Pour ce
faire, les approches pédagogiques et docimologiques sont plus que nécessaires
pour anticiper et prédire la validité et la fiabilité des concours HU. À
cet effet, le ministère de l’Enseignement supérieur (MESRS) a mis en place des
commissions de travail, dont celle de la réforme des concours HU. C'est dans ce
contexte favorable à la cogitation, cette contribution se propose de suggérer
des pistes de réflexion pédagogique et docimologique pour aller au-delà de
cette réforme en recommandant de soutenir et de promouvoir la refondation
profonde des concours HU tant attendus par la communauté médicale et par la
société.
En
effet, la réforme des trois épreuves des concours HU consiste à un retour aux
pratiques pédagogiques et docimologiques meilleures, et souvent antérieures à
l’action de réforme. En d’autres termes, c’est revenir à un ancien mode ou à un
outil d’évaluation meilleur par la révision du processus actuel des trois
épreuves des concours HU. Cette réforme proscrit le concept d’innovation, car
cette dernière consiste à l’adjonction de nouveaux critères pédagogiques et
docimologiques inexistante des trois épreuves à un processus d’évaluation déjà
en place en vue de son amélioration avec un impact qualitatif sur les produits finaux :
amélioration des pratiques pédagogiques et de la formation médicale.
Ainsi
on se pose les questions suivantes, en lesquelles la réforme des trois épreuves
pourra induire une innovation pédagogique et docimologique sans la révision de leurs
fondements? De plus, en quoi la réforme des trois épreuves était meilleure
avant l’action de cette réforme en cours de confection et souhaité par le MESRS
tout en sachant que les concours HU actuels ne répondent plus aux normes de
validité et de fiabilité pour la promotion et la sélection des médecins hospitalo-universitaires,
car le dossier académique actuel est peu
fiable et peu discriminant pour évaluer au mieux celui qui pourrait accéder à
la carrière HU.
Par
contre, la refondation des trois épreuves des concours HU, c’est le fait de fonder leur évaluation sur
des nouvelles bases docimologiques en vigueur, pédagogiques innovantes et des
valeurs éthiques, car c’est une responsabilité
importante requérant des compétences pédagogiques pointues. De plus, les pratiques évaluatives en
contexte des sciences de la santé sont très dynamiques d’où l’intérêt de la
double veille pédagogique et docimologique. Cette dernière consiste à s’ouvrir sur les autres milieux
de l’éducation médicale afin de voir ce qui s’y fait ainsi que sur les
dernières « tendances » de l’évaluation des trois épreuves des concours HU afin
de les appréhender et de les intégrer dans nos pratiques pédagogiques.
Lors de l’épreuve pédagogique (EP), la plupart des candidats complètent
des prestations d’enseignement selon un modèle traditionnel basé sur la
transmission quantitative des connaissances. L’acte d’enseigner et le processus
pédagogique d’enseignement sont souvent peu planifiés, voire improvisés, et
font souvent appel au bon sens et à l’intuition pour enseigner, mais la plupart
des candidats sont motivés à se procurer les meilleures pratiques pédagogiques
en vigueur. Hélas, ils ne disposent pas de suffisamment de ressources et ils
n’utilisent pas les bonnes méthodes d’enseignement et les bonnes stratégies
d’apprentissage pour y parvenir.
Il est d’emblée important de signaler que l’EP ne signifie
nullement « l’épreuve disciplinaire ou médicale ou l’épreuve pratique ». De
plus, l’EP est la
matrice et le fondement des concours HU où le jury évalue chaque candidat sur
ses connaissances médicales, ses habiletés de communication orale et écrite
ainsi que ses habiletés et processus pédagogiques d’enseignement. Pour ce
faire, l’EP nécessite une planification rigoureuse par chaque candidat et
ne doit pas être un simple exercice de transmission des connaissances par le
biais d’un exposé magistral unidirectionnel à sens unique.
De plus, lors des précédents concours HU, le jury est excédé par
les prestations des candidats qui se contentent de remémorer un contenu ou un
thème disciplinaire déjà appris par cœur. Étant expert du domaine de la même discipline
médicale que le candidat, le jury souhaiterait l’évaluer sur ses habiletés
pédagogiques pour enseigner et ses habiletés de communications. Donc, c’est au candidat
de séduire le jury pédagogiquement parlant, car il est admis que l’EP porte bien son
nom pour désigner les pratiques pédagogiques d'enseignement, de communication et
mérite d’être évaluée par un outil docimologique valide.
Lors de la conception du barème d’évaluation de l’EP, le panel
d’expert pourrait focaliser toute son attention sur les processus pédagogiques d’enseignement
selon les normes en vigueur. Pour ce faire, il faut doter les membres du
jury d’un barème d’évaluation valide et uniformisé centré plus sur les
pratiques pédagogiques d’enseignement et de communication orale et écrite que
sur le contenu disciplinaire ou médical. Aussi, il est nécessaire d’outiller
les membres du jury de compétences pédagogiques et communicationnelles pour
pouvoir guider et mener à terme et dans la bonne direction l’EP avec chaque
candidat.
L’épreuve pratique dite de résolution de problème est une épreuve
de raisonnement clinique (RC). Cette dernière est le fondement au cœur de
l‘exercice des professionnels de la santé. En effet, il ne suffit pas de
résoudre rapidement le cas clinique, mais de démontrer les habiletés de RC pour
synthétiser puis d’exploiter les informations obtenues pour prendre des
décisions diagnostiques, d’investigation et thérapeutiques. Pour ce faire, le
jury évalue le candidat sur cette compétence essentielle et cruciale : le
raisonnement clinique. À cet effet, il
faut doter le jury d’un outil d’évaluation simple d’utilisation et centré sur
le RC que sur les résultats finaux, et selon des critères docimologiques valide
et fiable. L’épreuve pratique pourrait
se dérouler sous forme d’une épreuve écrite d’un cas clinique ou oral de
préférence par une simulation malade. Pour ce faire, la rédaction écrite ou la simulation
orale du cas clinique doivent respecter les normes du processus de raisonnement
clinique, mais également être réalistes et riches en données pour favoriser et inciter
le candidat à promouvoir son raisonnement clinique.
L’épreuve d’anglais ne doit plus être une simple traduction
intégrale et linguistique d’un article vers le français, mais la capacité de
lecture critique d’un article (LCA). Il est nécessaire de valoriser la LCA par
une pondération conséquente et de modifier son appellation en « Lecture critique
d’Article en Anglais ». De point de vue pratique, il suffit d’attribuer au
candidat un article en anglais de sa discipline, mais sans le résumé et sans la
conclusion. Le jury doit signifier au candidat qu’en plus de la compréhension
scientifique de l’article en anglais, c’est la capacité de synthèse et
d’analyse du candidat à assimiler et à critiquer les données de l’article et
non pas la simple traduction linguistique de l’anglais.
Évaluer les concours HU est une responsabilité honorable et
éminemment morale requérant une probité intellectuelle. Elle n'est pas aussi
facile que l'on prétend, car elle exige des compétences pédagogiques et
docimologiques spécifiques des sciences de la santé aux services des trois épreuves
pédagogiques. De plus, pour donner du sens, de la signification et de la valeur éthique à ces concours
HU, l’instauration d’une lettre de motivation ainsi qu’une entrevue avec chaque
candidat constitueraient une étape fondamentale pour promouvoir la sélection
des candidats potentiels ayant présenté des compétences et des habiletés
conformes au statut d’un hospitalo-universitaire. Par ailleurs, l’instauration
d’une entrevue orale permet de donner la parole et la chance à chaque candidat
d’exprimer ses intentions, ses engagements et ses motivations à accéder un
poste d’enseignant-chercheur hospitalo-universitaire.
Par ailleurs et pour le poste de chefferie de
service, il est vivement recommandé à chaque professeur candidat de proposer un
véritable « projet de service » sous forme de document écrit et
exposé oralement devant le jury. Ce projet s’articulera autour de trois
composantes : un projet pédagogique pour l’amélioration de la formation
médicale, un projet d’action de recherche scientifique et d’encadrement des
thèses et finalement un projet d’amélioration et de gestion de la qualité des
soins de santé, car le dossier administratif est peu fiable et peu discriminant
pour évaluer au mieux celui qui pourrait occuper la fonction de chef de
service.
La refondation des trois épreuves des concours HU est une
résolution hautement salvatrice avec un impact incontestable sur l’amélioration
de la pratique de l'acte d'enseigner en contexte des sciences de la santé et sur
la qualité de la formation médicale. À cet effet, il est important de signaler
que « ces trois épreuves sont les composantes les plus discriminantes des concours
HU ». Ainsi, cette refondation s’assurerait de la promotion et de la
sensibilisation des futurs candidats à la dimension pédagogique des trois épreuves
des concours HU comme critère d'admission, de nomination et de titularisation. En
d’autres termes, par leur impact et effet discriminant, les trois principales
épreuves des concours HU et la certification périodique en pédagogie médicale
devraient être soutenues et promues comme outil de sensibilisation, de
conscientisation, de sélection et de promotion de la carrière HU des
professionnels de la santé.